5 janvier 2022 Restructuration commerciale et artisanale dans les quartiers prioritaires de la ville : Des méthodes d’intervention qui s’affinent au fil des expériences
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De Kennedy au Blosne en passant par Maurepas, les Quartiers Prioritaires de la Ville (QPV) font l’objet de projets de renouvellement urbain majeurs à Rennes. Inscrits dans le cadre de la convention NPNRU (Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain), la transformation de ces quartiers croise les enjeux de la ville de demain, tant sur le plan social que sur la désirabilité de l’habitat, la place de la nature et des mobilités. Ces opérations d’aménagement intègrent parallèlement d’importants leviers d’actions contribuant à développer leur attractivité économique et l’emploi local par la diversification de l’offre de commerces, le soutien à l’artisanat et le développement des services à la population. Pour mener à bien ce dernier volet, Territoires, en lien étroit avec les politiques publiques de la ville, accompagne la collectivité à travers un dispositif stratégique, opérationnel et méthodologique volontariste qui a su évoluer et s’adapter au fil des expériences.

OUVRIR et ACCUEILLIR : DES ESPACES PUBLICS redessinés AU PROFIT D’UNE OFFRE DIVERSIFÉE

« Sur l’ensemble du quartier de Maurepas, une partie de notre intervention concerne la requalification des centres commerciaux existants qui sont typiques de l’urbanisme de dalle des années 60 - 70.

 

En s’appuyant sur l’arrivée du métro et la réalisation de nouveaux espaces publics, les opérations visent à désenclaver ces polarités pour les rouvrir à l’ensemble du quartier et réorganiser l’offre commerciale pour répondre aux besoins des habitants. La centralité des Gayeulles a été restructurée en ce sens. L’intervention au Gros Chêne sera similaire avec la restructuration du centre commercial qui sera directement accessible et visible depuis la nouvelle station de métro.
L’activité artisanale trouve aussi sa place dans ces quartiers. Le projet urbain s’attache à proposer des locaux d’artisans dans la ville, en particulier pour les petites activités déjà présentes à Maurepas. C’est déjà le cas pour Les Gayeulles avec les premiers « Ateliers de Maurepas » réalisés en 2017. Ce travail va se poursuivre sur les deux secteurs opérationnels. Au Gros Chêne, nous travaillons également en lien étroit avec le bailleur Archipel Habitat sur les pieds de tours connectés à l’espace public. Il s’agirait de transformer quelques Locaux Commun Résidentiel (LCR) pour accueillir des activités avec une vraie vocation économique. Il y a, en outre, toute une réflexion qui est menée avec les associations du quartier en relation avec le sujet de la vacance des locaux. Par exemple, l’actuelle bibliothèque va déménager et libérer 500 m² pour des associations dans le pôle associatif Marbaudais. Les équipements font aussi partie intégrante de cette stratégie. Le nouvel Espace Social Commun, qui regroupera de nombreux services, ou encore la future antenne du Musée des Beaux-Arts contribuent à cette nouvelle impulsion.

Il s’agit de recréer les conditions de mixité, au sens large du terme, pour que Maurepas accueille à la fois des habitants et une nouvelle population venant travailler ou consommer sur le quartier. » - Julien Bailleul, chef de projets Maurepas pour Territoires

 

Photo : Ateliers de Maurepas, gare © Yohann Lepage

Accompagner : la proximité au service de la réalité économique des acteurs

Au Blosne comme à Maurepas, une large partie de l’intervention concerne la gestion et l’organisation des transferts des commerçants vers leurs nouveaux locaux. Un travail de dentelle qui se traduit par un accompagnement des exploitants au cas par cas et selon leurs besoins.

 

« À Maurepas-Gayeulles, l’enjeu pour la collectivité était de reconstituer un outil commercial dynamique et attractif offrant
une nouvelle diversité aux habitants.

Dans le cadre du projet urbain, l’idée était de prendre appui sur cette nouvelle polarité pour pouvoir recréer une centralité réfléchie de manière plus globale sur la mixité des usages avec le positionnement des commerces en pieds d’immeubles à vocation mixte et à proximité du métro et du pôle d’échange multimodal.

Dans la mise en oeuvre du projet, nous avons déployé une méthode à « tiroir » impliquant la réalisation de nouveaux programmes sur les abords de la future centralité, le transfert et relogement des commerçants puis la démolition de l’ancien bâti pour terminer sur la réalisation des nouveaux espaces publics. C’est un vrai jeu de chaises musicales qui nécessite d’avancer progressivement. Le projet a été construit dès le début dans cet optique dans un souci de réalité économique pour les différents acteurs.

Aujourd’hui, la majorité des exploitants est installée dans leurs locaux, la nouvelle place du marché vit avec les commerces alentours et le supermarché ouvert depuis le printemps 2022. Le bilan est très satisfaisant car ils disposent aujourd’hui de locaux plus agréables et d’une clientèle qui s’est maintenue voire intensifiée avec l’arrivée des nouveaux habitants et salariés sur le quartier. » - Anne Lebrun, responsable d'opérations Maurepas-Gayeulles pour Territoires

 

Photo : Station de métro Les Gayeulles © Yohann Lepage

ÊTRE À L’ÉCOUTE DES INITIATIVES DE QUARTIER

Selon les mêmes enjeux, la Ville de Rennes fait appel à Territoires Publics pour mener à bien le remaniement de l’outil commercial du quartier du Blosne-Est, au sud de la Ville. En articulation directe avec l’opération de renouvellement urbain pilotée par la ville, Territoires accompagne la collectivité à travers une mission dédiée, le Contrat de Revitalisation Artisanale et Commerciale (CRAC) Blosne-Est signé en 2019. Le projet est voué à recentrer l’offre vers la nouvelle centralité de quartier tout en restant à l’écoute des initiatives émergentes. En 2020, la SODES a été retenue comme opérateur commercial unique sur le projet.

Vue de la place Jean Normand sur deux des nouveaux bâtiments du Maxi-Lot A © Chouzenoux Architecture, Martin Duplantier Architectes, Jean-François Madec Architecte.

 

« Dans le cadre de cette ZAC, il y a un programme ambitieux de renouvellement urbain mêlant réhabilitation d’habitats existants, en lien avec les bailleurs sociaux et, constructions neuves pour développer la mixité urbaine du quartier.

 

L’aspect sur lequel nous travaillons est le rééquilibrage de l’offre économique, au sens large du terme, sur le quartier et vis-à-vis de l’extérieur en transférant une partie des commerces existants depuis trois petites polarités vers la centralité de quartier autour de la place Jean Normand.

C’est un projet très particulier puisque nous ne faisons pas d’aménagement des espaces publics. L’enjeu et la complexité résident dans la maîtrise foncière et le cadre opérationnel cadencé par un planning contraint. L’ensemble des missions de l’opération, c’est-à-dire, gérer le transfert des commerçants, maîtriser l’ensemble du foncier, réaliser les nouveaux programmes, transformer ou démolir les anciens centres commerciaux, doit être réalisé avant décembre 2026. Au Blosne, l’un des centres commerciaux sur lequel nous intervenons (Sainte-Elisabeth) accueille un pôle santé. Compte tenu de l’offre faible en professionnels et spécialistes, il y a un enjeu fort de les reloger dans le cadre de l’opération. Lors des études, un centre de santé communautaire a émergé sur le quartier. Il intègrera demain un des bâtiments réalisés place Jean Normand. C’est une chance que nous avons eue. Ils sont arrivés au bon moment, dans la période où nous étions en train de travailler sur la programmation, où l’on cherchait à densifier et à augmenter les surfaces afin d’accueillir des services attractifs répondant aux besoins de la population. Nous avons donc pu les intégrer dans un des nouveaux programmes sur la place. De même, au-delà des rez-de-chaussée actifs, une autre opportunité s’est présentée avec un projet de résidence étudiante porté par l’Ecole Normale Supérieure (ENS). Nous avons intégré au Maxi Lot A 360 lits dédiés aux étudiants, dont 40 pour ceux du Conservatoire et du Pont Supérieur, un équipement majeur réalisé sur la place par la ville de Rennes.

Pour construire une nouvelle centralité de quartier, nous avons besoin de commerces mais aussi d’activités qui permettent de créer un lieu de destination et de service à la population. C’est en ce sens que nous avons réfléchi à l’implantation des commerces mais aussi à celle d’activités complémentaires pour que cette centralité prenne toute l’ampleur qu’on espère. » - Katell Ruellan, responsable d'opérations CRAC Blosne-Est pour Territoires

PORTER : LE TRAVAIL PARTENARIAL AVEC UN OPÉRATEUR COMMERCIAL UNIQUE

Pour mener à bien ces opérations, Territoires s’est associé à la SODES, opérateur commercial unique désigné sur les opérations Maurepas-Gayeulles et Le Blosne, pour réaliser le portage et la gestion des rez-de-chaussée actifs.

« Nous sommes venus à Rennes pour travailler sur l’opération Maurepas-Gayeulles en étant associés à Territoires & Perspectives et à la Caisse des Dépôts au sein de la SCI du centre commercial des Gayeulles. Ensuite, nous avons été retenu comme opérateur commercial unique sur le Blosne-Est. Sur cette opération, nous sommes en co-maîtrise d’ouvrage avec le promoteur, nous revendons ensuite les cellules commerciales en VEFA à la SCI Le Blosne associant la SODES et Territoires & Perspectives.

Sur le Blosne, tout a bien été anticipé en termes d’urbanisme avec un espace public de qualité qui permet de bonnes conditions de concentration des flux et de visibilité pour la création d’un lieu de vie à bonne échelle.

Nous travaillons main dans la main avec Territoires et les services de la ville sur les transferts des exploitants.

Nous intervenons en co-maîtrise d’ouvrage avec le bailleur Espacil sur la réalisation du Maxi-Lot A et avons lancé avec Territoires une consultation d’enseignes pour le futur preneur de la moyenne surface alimentaire du Maxi-Lot B. Nous l’avons spécifiquement fait avant la consultation promoteur pour pouvoir, selon les retours de l’enseigne, adapter sa fiche de lot et ainsi avoir la cellule la plus adaptée possible à l’activité et limiter les coûts d’aménagements ultérieurs à charge du preneur.

Notre approche en terme de montage technique et juridique vise également à limiter le plus possible les charges du commerçant, une démarche encore plus sensible dans le cadre des QPV. En tant que maître d’ouvrage, nous prenons le risque en investissant mais nous optimisons le prix de revient en supprimant les marges des intermédiaires et en n’appliquant pas les marges de prudence courantes en VEFA. Les loyers de sortie sont ainsi plus abordables, ce qui fait particulièrement sens au sein de quartiers tels que le Blosne ou Maurepas. L’autre intérêt de notre méthodologie est de garantir l’indépendance technique des commerçants en limitant notamment les zones d’échanges entre les commerces et les habitations, ce qui permet d’assurer de meilleures conditions de gestion. » - Frédérique Vallée - Directrice du développement et des programmes à la SODES

 

Photo : Rez-de-chaussée commerciaux dans l'immeuble de logements Sensea à Maurepas-Gayeulles © Yohann Lepage